Mesures gouvernementales face au coronavirus : n’oublions pas les travailleurs indépendants !

Les travailleurs indépendants sont incontournables pour notre économie. Une fois la crise passée, leur mobilisation sera également indispensable pour assurer une reprise rapide et durable. C’est pourquoi il est important que les mesures de soutien à leur égard soient plus complètes et mieux adaptées.

Vers une meilleure reconnaissance des indépendants

Dans chacune de ses interventions au sujet de la crise sanitaire en cours, le Président de la République a nommément évoqué les indépendants. Cela n’aurait probablement pas été le cas il y a encore quelques années, et nous pouvons nous en réjouir, nous en féliciter.

Qu’il s’agisse de l’arrêt maladie indemnisé sans délai de carence, du report des échéances sociales et fiscales ou du fonds de solidarité qui devrait indemniser à hauteur de 1 500€ forfaitaires (si le chiffre d’affaires de mars 2020 se révèle inférieur à 70% de celui de mars 2019), les mesures de soutien annoncées ont le mérite d’intégrer aussi les indépendants.

Cependant, elles présentent des insuffisances importantes. Plus exactement, elles ne répondent pas de manière satisfaisante aux spécificités du statut de travailleur indépendant.

De la nécessité d’affiner et préciser rapidement ce qui est prévu

Concernant l’indemnisation d’un arrêt maladie, les régimes obligatoires de sécurité sociale des professions indépendantes, bien que nombreux et hétéroclites, ont en commun le faible niveau d’indemnisation des arrêts de travail (la CIPAV, principale caisse de prévoyance des professions libérales, n’indemnise tout simplement pas l’interruption temporaire de travail !). Dans la situation présente, qui impose un arrêt de longue durée, est-il juste de se reposer sur ces mécanismes insuffisants ?

Les professions libérales « historiques » souscrivent, pour l’écrasante majorité, à des contrats complémentaires de prévoyance. Ce n’est pas le cas des micro-entrepreneurs, souvent précaires et longtemps délaissés par les compagnies d’assurance. Par ailleurs, ces contrats prévoient un délai de carence et des justificatifs médicaux, voire excluent les épidémies ! Les discussions avec les assureurs, annoncées par le gouvernement, constituent donc un chantier primordial.

Enfin, les dispositions annoncées ne couvrent que certaines situations et laissent de côté les travailleurs indépendants les plus fragiles. Quelle que soit l’ancienneté, un salarié peut prétendre au chômage partiel ou à l’arrêt maladie pour sécuriser ses revenus dans la tourmente sanitaire et économique en cours. Quid des travailleurs indépendants sans enfant de moins de 16 ans, et qui ne peuvent pas justifier de chiffre d’affaires en mars 2019 ?

Les indépendants, à la fois fragiles et indispensables

Graphistes, artisans, consultants indépendants, webdesigners, agents immobiliers, photographes, livreurs… Les travailleurs indépendants seront les premiers touchés par les coupes budgétaires dans les grandes entreprises, les annulations de contrats plus ou moins justifiées, une protection sociale réduite. Certains diront que c’est le prix à payer pour cette liberté qui nous est si chère : nous assumons nos choix et « en temps normal », nous ne nous plaignons pas. Cependant, le Président l’a dit et répété, nous ne sommes plus « en temps normal », nous sommes en guerre contre une épidémie d’une ampleur inédite. Et dans ce contexte exceptionnel, il s’agit d’éviter une détresse socioéconomique massive au cours des prochains mois.

Nous sommes aussi une courroie de transmission absolument clé dans l’économie du pays. Nous sommes, par définition, des individus qui sortent de leur zone de confort pour entreprendre et innover, écrire leur propre destin. Nous sommes les micro-entreprises qui apportent de la flexibilité aux plus grandes, les indépendants qui font vivre les territoires, les autoentrepreneurs qui feront les start-ups prometteuses de demain. Les PME et grands groupes ne s’y trompent d’ailleurs pas, qui s’appuient de manière croissante sur nos expertises, notre audace et notre flexibilité. A l’heure de l’« entreprise étendue », la distinction entre salariés et travailleurs indépendants ne cesse de s’estomper et lorsque cette période difficile sera passée, c’est tous ensemble que nous devrons être prêts pour faire redémarrer notre économie.

Depuis le début de cette crise nous savons que celle-ci est et doit être une leçon pour notre époque, un appel à bâtir un futur différent. Or, les travailleurs indépendants représentent une brique majeure du futur du travail. L’émergence, demain, d’une économie solide et solidaire passe immanquablement par les indépendants, et exige que ces derniers fassent partie des solutions qui se créent aujourd’hui. Ne l’oublions pas !

Partager cet article :

LinkedIn
Twitter
Facebook